Contrairement aux idées reçues, les petites et moyennes entreprises françaises ne sont ni handicapées ni défavorisées lorsqu’elles candidatent à des appels d’offres publics. Selon une étude publiée par l’Observatoire des PME, l’Etat attribuerait en effet aux petites et moyennes entreprises 61 % de ses marchés de plus de 45.000 euros et les collectivités locales 70 % (« Regard sur les PME » nº 5, juin 2004). L’accès à la commande publique par les PME devrait encore progresser dans les années à venir grâce à l’une des innovations majeures du Code des marchés publics version 2004 : la dématérialisation des marchés publics. L’article 56 dudit Code dispose en effet que, à partir du 1er janvier 2005, toutes les collectivités publiques doivent être en mesure de recevoir, par voie électronique, les réponses des entreprises à leurs appels d’offres.
Qu’est que la dématérialisation des marchés publics ?
Le 27 septembre 2004, le Ministère de l’Economie, des Finances et de l’Industrie a mis en ligne sur son site un guide pratique définissant la dématérialisation comme « une technique, à laquelle il est reconnu une valeur juridique, pour la mise en œuvre des règles de l’achat public » (www.minefi.gouv.fr/daj/marches_publics/vademecum/vmdemat.htm#9_6).
Concrètement, la dématérialisation consiste pour l’acheteur public à mettre en ligne, d’une part, le règlement de la consultation, la lettre de consultation (en matière d’appel d’offres restreint et de procédure négociée), le cahier des charges ou dossier de consultation des entreprises (DCE) ainsi que des renseignements et documents complémentaires tels qu’un projet d’acte d’engagement à compléter ou le cahier des clauses techniques particulières (CCTP).
Les modalités d’accès sur Internet à ces documents doivent être précisées dans l’avis d’appel public à la concurrence dont la publication reste assurée par un journal d’annonces légales.
D’autre part, la personne publique doit permettre aux entreprises de suivre sur le réseau informatique les différentes étapes de la procédure d’appel d’offres qui les intéressent. Ainsi, le Ministère de l’Economie préconise que l’acheteur public mette en ligne un « Journal des évènements » précisant :
- la mention de la mise en ligne de l’avis d’appel public à la concurrence, du règlement de la consultation, du DCE et des modifications qui peuvent y être apportées;
- la liste des personnes ayant téléchargé ces documents;
- la mention de tous les échanges d’information intervenus avec ces personnes;
- les références des candidatures et des offres reçues qu’elle soient sous forme électronique ou forme papier;
- la description des opérations d’ouverture des candidatures et des offres menées aussi bien par la personne responsable du marché (PRM) que par la commission d’appel d’offres (CAO) et des documents qui en découlent;
- la trace de la notification du marché, de l’information des offres non retenues ou de la décision de déclarer sans suite la procédure; etc.
Quels sont les marchés publics concernés par la dématérialisation ?
A priori, le manque de recul concernant cette technique oblige à la prudence, la dématérialisation des documents et des échanges d’informations précités est possible pour l’ensemble des marchés qui rentre dans le champ d’application du Code des marchés publics.
La seule obligation de l’article 56 du Code des marchés publics est celle, pour l’acheteur public, de pouvoir recevoir les candidatures et les offres par Internet depuis le 1er janvier 2005. Cependant, cette obligation n’est pas aussi contraignante que l’on peut le penser car elle ne s’applique ni aux marchés passés selon une procédure adaptée (article 28 du CMP), ni aux marchés de services visés à l’article 30 du Code des marchés publics. En d’autres termes, l’obligation de réception électronique des candidatures et des offres ne concerne que les marchés supérieurs à 230.000 euros (Cf. réponse ministérielle n° 34231, JOAN Q, 6 juillet 2004, p. 5127).
Quels sont les avantages de la dématérialisation des marchés publics ?
La dématérialisation est une procédure flexible. En effet, la mise en ligne des documents est laissée à la discrétion de la personne publique qui peut continuer à lui préférer le traditionnel support papier ou, mieux, décider de doubler le support dématérialisé d’un support papier. En revanche, comme nous venons de le voir, l’acheteur public a désormais l’obligation de pouvoir recevoir les candidatures et les offres par Internet pour les marchés supérieurs à 230.000 euros.
A l’inverse, aucune obligation ne pèse sur l’entreprise candidate qui reste libre, en toutes hypothèses, de recevoir le règlement de la consultation et le DCE soit par voie électronique, soit « par voie postale, sous forme d’un support physique électronique (CD-ROM ou disquette) ou sous forme d’un support papier » (article 2, alinéa 4, du décret n° 2002-692 du 30 avril 2002).
La procédure dématérialisée a l’avantage de la rapidité attaché aux échanges par Internet. Par exemple, la conclusion du marché se trouvera accélérée par la signature électronique de l’acte d’engagement par le candidat puis par la personne responsable du marché (article 3, alinéa 2, du décret du 30 avril 2002 renvoyant aux dispositions des articles 1316 à 1316-4 du Code civil).
Par ailleurs, dématérialisés, les documents relatifs au marché pourront plus aisément être stockés et archivés par le candidat.
Mais, le plus grand avantage de la procédure dématérialisée est sans nul doute la transparence et la clarté qu’elle apporte à la passation du marché. Elle permet en effet d’avoir une meilleure traçabilité, via le « Journal des évènements », des échanges entre les candidats et l’acheteur public, de l’avancement de la procédure et de ses éventuels incidents.
La dématérialisation des marchés publics s’inscrit enfin dans le cadre plus général du développement de l’administration électronique qui touche aujourd’hui tant la France que l’Europe.
Même si, il est vrai, elle n’est pas dénuée d’une certaine complexité, la procédure dématérialisée ne peut que favoriser l’accès à la commande publique des petites et moyennes entreprises. Faudra t-il, du reste, que les personnes publiques jouent le jeu de cette dématérialisation pour les marchés inférieurs au seuil de 230.000 euros.